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Édition spéciale : Comment une entreprise peut-elle lutter contre l’absentéisme abusif au travail d’un employé ?

juin 13, 2022

Chaque année, les entreprises sont confrontées au phénomène d’absentéisme de leur masse salariale. Les conséquences sont nombreuses aussi bien sur le plan financier qu’organisationnel. Notons que toutes les absences n’interviennent pas dans le cadre de l’absentéisme. En effet, certaines absences (formations, congés payés, maternité, etc.) sont prévisibles et s’appuient sur des droits sociaux. Les absences « non prévisibles » sont celles qui définissent la notion d’absentéisme. Cette dernière se caractérise par les accidents de travail, les arrêts pour maladies, les maladies professionnelles, les accidents intervenus en dehors du milieu de travail et les absences injustifiées. Il est important de suivre ces absences relativement perturbatrices dans le bon fonctionnement de l’entreprise.

Avant de nous pencher sur le sujet des absences abusives pour cause d’invalidité, nous souhaitons vous partager un extrait issu de la Commission des normes de l’équité de la santé et de la sécurité du travail (CNESST), relevant des droits des employés en termes d’absentéisme : « les travailleuses et travailleurs doivent parfois s’absenter de leur travail en raison de certains événements de la vie. Ils ont droit à ces congés et leur lien d’emploi est protégé pendant leur absence. Ces congés peuvent être avec ou sans salaire. ». Toutefois, toute absence d’un salarié non justifiée ou à caractère abusif peut être réprimée par l’employeur.   

Pour répondre au mieux à cette problématique à laquelle sont confrontées de nombreuses entreprises, nous nous sommes entourés de Yves Lefebvre, directeur Conseils et enquêtes, chez GardaWorld.   

*Le contenu du présent texte n’est fourni qu’à titre informatif et ne constitue pas un avis juridique ou une opinion de quelque nature que ce soit. 

 

 

Yves, merci de prendre le temps aujourd’hui de partager votre expertise relative aux enquêtes en milieu de travail pour cause d’invalidité abusive. En quelques mots, pouvez-vous nous exposer les principales raisons pour lesquelles un employeur souhaite vérifier la véracité de l’incapacité d’un employé à travailler ?  

Tout d’abord, merci de m’avoir invité à partager mon expérience à ce sujet. Il faut savoir qu’en règle générale, l’employeur donne toujours le bénéfice du doute à l’employé lors d’un arrêt de travail. Toutefois, lorsque son absence se prolonge dans le temps, l’employeur peut être amené à vouloir vérifier la légitimité de cette absence. 
Il est bon de rappeler les deux cas de figure auxquels font généralement face les entreprises et pour lesquelles, elles ont des raisons de soupçonner la véracité de la condition du salarié absent. 

Le premier cas de figure est lorsque l’absence d’un salarié est motivée par un événement qui est arrivé sur son lieu de travail ou des suites d’une maladie professionnelle. Dans le cadre du prolongement de cet arrêt de travail, l’employeur peut avoir raison de remettre en question la véracité de la condition de son salarié sous réserve d’avoir un motif raisonnable. Prenons l’exemple d’un accident de travail qui s’avère « fictif ». Cela signifie que l’employé absent prétend avoir eu un accident sur son lieu de travail alors qu’en réalité il n’est jamais survenu. Parfois, l’accident de travail s’est bien produit et a fait l’objet d’un diagnostic médical justifiant son arrêt de travail mais celui-ci a été prolongé dans le temps de façon injustifiée. Ainsi, si l’employeur a un motif raisonnable pour remettre en question l’absence de son salarié, il peut demander l’ouverture d’une enquête en filature

Le second cas de figure est lorsque l’employé est absent car il est victime d’une maladie ou d’un accident, tous deux survenus en dehors du travail. Si l’employeur a un motif recevable, il peut procéder à une enquête afin de vérifier si le prolongement est indu, ou si l’événement ne s’est jamais produit.  

Dans ces deux cas de figure, l’enquête va tenter de démontrer que l’employé a des activités contraires à sa prétention d’incapacité. Prenons l’exemple, d’un employé qui prétend devoir se déplacer avec une canne et être en incapacité d’emprunter des escaliers, de soulever des charges. Dans ce cas, l’enquête en filature intervient pour vérifier la condition du salarié et auquel cas démontrer qu’il effectue des gestes, des faits contraires à ses déclarations. 

 

Avant de réaliser une enquête en filature, quels sont les outils dont dispose l’employeur pour vérifier la véracité de l’absence de son salarié?

L’employeur dispose d’une série d’outils de gestion des absences salariales. Ces outils participent à la mise en lumière d’un motif raisonnable de croire que l'employé élude un retour au travail ou simule sa pathologie. Pour les connaître, il peut s’orienter vers son service juridique s’il en a un, vers son service de ressources humaines ou tout autre organisme compétent en la matière. 

Tout au long de l’enquête, le droit fondamental de l’employé à la vie privée doit être respecté. D’où l’importance pour l’employeur d’avoir des motifs raisonnables pour faire appel aux services d’enquêtes et filature. En l’absence de cette condition, l’individu ne peut être suivi. 

 

De quelles prérogatives l’employeur peut-il se prémunir pour réaliser une enquête en filature?

Surveillance par filature

 

Tout d’abord, l’employeur ne peut pas procéder à la surveillance par filature de son employé sur la base de simples doutes. Comme évoqué précédemment, il doit au préalable fournir des motifs raisonnables afin de pouvoir procéder à la filature de son salarié absent. En l’absence de ces éléments, la preuve pourrait être rejetée par toute instance.   
 
Il convient de rappeler que le droit du travail est un droit de faits. Ainsi, chaque décision rendue est propre aux faits rapportés. Voici quelques pistes pouvant mener éventuellement à avoir un doute raisonnable :  

- L’employé ne se présente pas à ses divers rendez-vous médicaux.  

- La discordance entre les douleurs et pathologies rapportées par l’employé et ses activités.  

- La dénonciation d’un collègue, d’un voisin, ou tout autre personne.  

La filature doit apparaître comme un moyen nécessaire pour vérifier les faits et gestes de l’employé. En soi, cette dernière porte atteinte à la vie privée. C’est pour cela, qu’il est important de rappeler qu’elle doit être utiliser dans des circonstances exceptionnelles et de manière la moins intrusive possible. Pour cela, les preuves doivent être collectées dans des lieux publics ou autour de la résidence de l’employé, de manière à être visible du grand public. 

 

Lorsqu’une enquête en filature fait état du caractère abusif de l’absence de l’employé, quels sont les recours que l’employeur peut avoir contre l’employé ?

Lorsque le rapport de la filature révèle un caractère abusif et mensonger de la condition de l’employé, la décision finale appartient à l’employeur. Ce dernier peut s’orienter vers les organismes compétents pour faire valoir ses droits. Quelques exemples de décisions que l’employeur peut décider de prendre :  

- Contester les faits auprès de la CNESST afin réduire les coûts liés à l’arrêt du salarié. 

- Congédier l’employé. 

Rappelons que le lien de l’emploi est basé sur la confiance. Lorsque celui-ci est rompu, le congédiement de l’employé est plausible. 

 

En conclusion, l’employeur dispose d’outils de contrôle de la légitimité de l’absence répétée de l’un de ses salariés. Lorsque la filature est sollicitée par l’employeur, il est important que les critères définis par la jurisprudence et la législation soient respectés afin que les preuves découlant de la filature soient recevables.  

 

Yves, un grand merci d’avoir partagé votre expertise au sujet des enquêtes en milieu de travail pour cause d’absence abusive. Nous espérons que cet article aidera les entreprises à recourir aux bonnes pratiques face à l’absence douteuse d’un salarié. 

Je suis ravi d’avoir pu contribuer à cette discussion. Notre équipe de conseils et enquêtes est prête à aider les entreprises pour lutter contre les formes abusives d’absentéisme au sein de leur organisation.  
 
Contactez nos experts du service conseils et enquêtes pour en savoir plus sur comment réduire l’absentéisme au travail.